TEMPS DE LECTURE : 7 MINUTES

TEMPS DE LECTURE : 7 MINUTES •

de la politique spectacle à la politique interactive

L’hologramme de Jean-Luc Mélenchon en 2017 a marqué un tournant dans l’imaginaire des campagnes politiques françaises. Plus qu’un gadget technologique, il symbolisait une volonté de réinventer la présence politique : parler à plusieurs villes simultanément, créer un événement hybride entre le meeting et la performance scénique, QUI ATTIRE AUSSI PAR SON INNOVATION DE donner à voir une figure politique « augmentée ».

Mais, huit ans plus tard, l’enjeu n’est plus tant de projeter une image, que d’activer une communauté. Dans un monde où le lien politique se joue autant dans la rue que dans les fils d’actualité, la question n’est plus : comment capter l’attention ? mais comment susciter l’action ?

C’est dans ce contexte que j’aborde la question de la gamification politique, articulée à des stratégies phygitales, deux notions empruntées, non sans une pointe de provocation, à la culture start-up et tech. Il s’agit ici de repenser l’engagement électoral en mobilisant les ressorts du jeu (défi, récompense, progression, coopération) pour conjuguer le numérique et le terrain dans une même dynamique participative. ET PROMIS, C’EST PAS INCOMPATIBLE AVEC VOS IDEES.

1. Le paradigme phygital : continuité du lien entre le terrain et le numérique

La frontière entre LE TERRAIN politique et son double numérique s’estompe. Un tract scanné devient une porte d’entrée vers un CLIP DE CAMPAGNE ; un QR code sur une affiche mène à une proposition citoyenne ; une story Instagram prolonge une rencontre publique.

Les campagnes les plus performantes ne pensent plus “digital” et “terrain” comme deux mondes distincts, mais comme un continuum d’expériences. C’est ce qu’avait théorisé Barack Obama dès 2008 en articulant porte-à-porte et micro-donations en ligne, ou plus récemment, ce qu’ont perfectionné Bernie Sanders et Alexandria Ocasio-Cortez (AOC), à travers des plateformes participatives telles que Slack ou Action Network, où chaque bénévole devient micro-ambassadeur. EN FRANCE, LA FRANCE INSOUMISE A AUSSI DEVELOPPER SA PLATEFORME, “ACTION POPULAIRE”.

FUSION DE “DIGITAL” ET de “PHYSIQUE”, C’eST ICI que la notion de phygital émerge, comme une bonne association de ces 2 canaux.

2. Les ressorts de la gamification : participation, progression, reconnaissance

La gamification politique repose sur une idée simple : l’engagement est une expérience. Les leviers du jeu peuvent renforcer cette expérience à condition de servir un objectif civique clair.

  • Défi : accomplir une mission (venir à une réunion, coller une affiche, partager une idée).

  • Progression : visualiser l’impact de ses actions (points, niveaux, statistiques de terrain).

  • Reconnaissance : badges, SCORES, remerciements publics...

  • Communauté : appartenance à une “équipe locale”, coordination en ligne et sur le terrain.

À l’étranger, le parti travailliste britannique a expérimenté dès 2015 une application mobile baptisée Labour Doorstep, qui permettait de suivre la campagne de porte-à-porte et de cumuler des “achievements” militants. Aux États-Unis, les Democratic Socialists of America ont utilisé Reach, une application qui transforme chaque contact personnel en “mission citoyenne” enregistrée dans la base de campagne.

En France, de telles démarches restent embryonnaires, mais plusieurs initiatives locales, notamment les plateformes de démocratie participative citoyenne, en posent les bases.

3. Du meeting au terrain augmenté : les nouvelles scènes de la campagne

Les outils de gamification peuvent transformer la manière dont on met en scène la campagne dans l’espace public. Le street marketing politique devient un levier puissant DE PEDAGOGIE ELECTORALE s’il conjugue créativité, symbolique et participation.

Quelques pistes concrètes :

  • Chasse au QR code citoyen : disséminer dans la ville des afficheTTES interactives menant à des propositions du programme SECTORISÉES, avec OU SANS récompenses symboliques, COMME “DEBLOQUER DES BADGES” pour ceux qui les trouvent.

  • Mur d’expression augmentée : un mur physique où les habitants laissent une idée, relié en direct à un site web qui agrège les contributions en nuage de mots.

  • Défis collectifs : “1000 portes ouvertes avant samedi”, suivi en temps réel sur les réseaux sociaux.

  • CLEAN WALKS & DJ SET POUR INNOVER VOS MEETINGS

  • Stands immersifs : reconstitution virtuelle d’un quartier futur, à visiter via casque VR ou projection, pour visualiser la mise en œuvre du programme.

La logique est celle du parcours du citoyen : rendre tangible sa contribution, relier chaque micro-action à un récit collectif, et ancrer la campagne dans une dynamique ludique, inclusive et mesurable.

4. De l’activation à la fidélisation : penser la campagne comme un écosystème

La gamification ne s’arrête pas le soir de l’élection. Elle peut servir de base à une culture politique participative, où la relation entre élus et citoyens se poursuit à travers des outils numériques d’implication continue.

Exemples inspirants :

  • Taipei : la plateforme vTaiwan, où chaque habitant peut co-construire les lois locales via un système de contributions notées et gamifiées.

  • Madrid : la plateforme Decide Madrid, pionnière des budgets participatifs en ligne, qui s’appuie sur un système de scores citoyens pour prioriser les propositions.

Dans ces expériences, la gamification n’est pas cosmétique : elle est infrastructurelle. Elle permet de transformer le rapport entre institutions et citoyens en une logique d’interaction permanente, et non plus de sollicitation ponctuelle.

5. Les précautions éthiques : ne pas “jouer” avec la démocratie

La gamification politique ne doit jamais devenir un outil de manipulation émotionnelle. Elle doit servir la transparence, la pédagogie et la co-construction, pas la compétition ou la propagande.

Quelques règles cardinales :

  • Toute récompense doit avoir une finalité civique claire, ELLE NE DOIT PAS ETRE MATÉRIELLE NI FINANCIÈRE.

  • Les données personnelles doivent rester strictement confidentielles.

  • CES LEVIERS ne doiVENT pas altérer la sincérité du débat politique.

C’est à ces conditions que la campagne phygitale pourra devenir un laboratoire d’engagement démocratique, et non une simple adaptation marketing de la politique.

Conclusion : du citoyen spectateur au citoyen joueur

Gamifier la campagne politique, c’est finalement changer de paradigme : FAIRE d’un électeur consommateur à un citoyen contributeur, d’une communication descendante à une relation horizontale, d’un temps électoral fermé à une dynamique continue d’implication.

Dans un moment où la démocratie représentative cherche à retisser la confiance, la gamification, pensée avec rigueur et éthique, peut devenir un outil d’éducation civique moderne. Non pas pour rendre la politique “fun”, mais pour la rendre vivante.

👉 Vous préparez une campagne locale ? Je peux vous accompagner pour concevoir une stratégie PHYGITALE claire, sobre et efficace, au service du terrain.

    1. Les Échos (février 2017).

      Le studio français qui dédouble Mélenchon en hologramme. → Première expérience française emblématique de campagne phygitale, alliant technologie de projection et mise en scène politique.

    2. The Guardian (avril 2017).

      Labour needs a smart doorstep army. → Exemple britannique d’outillage numérique du militantisme local, annonçant les formes de gamification militante.

    3. Wired (juin 2008).

      Obama’s Secret Weapons: Data, Digital, and Volunteers. → Source de référence sur la première intégration structurée du numérique dans une campagne de terrain.

    4. Participedia (2020).

      Use of the REACH App in AOC’s 2018 Campaign. → Étude de cas sur la gamification du porte-à-porte et la logique de missions citoyennes dans les campagnes américaines.

    5. Democracy Technologies (octobre 2023).

      Consensus Building in Taiwan: How vTaiwan Uses Gamified Civic Deliberation. → Référence internationale sur l’usage du design participatif et du jeu dans la démocratie délibérative.

    6. Open Government Partnership (2023).

      Decide Madrid: End-of-Commitment Report. → Étude institutionnelle sur la participation citoyenne gamifiée et les scores de propositions citoyennes à Madrid.